Télétravail et risques pour la santé : encore trop peu de données
Le télétravail s’est généralisé depuis la crise du Covid-19, voici 4 ans. Pourtant, selon l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses), les données scientifiques sur cette nouvelle organisation du travail restent à ce jour insuffisantes pour bien connaître et prévenir les risques pour la santé. C’est ce qui ressort d’une étude, diligentée par l’Anses, menée par l’Institut de recherche en santé environnement et travail (Irset). Les études les plus anciennes et celles menées durant la pandémie sont en effet jugées obsolètes du fait du développement rapide du télétravail et du contexte pandémique désormais hors sujet.
Les risques identifiés
A partir des connaissances disponibles, ces travaux ont toutefois pu mettre en évidence plusieurs effets indésirables et facteurs aggravants du télétravail dans trois domaines :
la santé : troubles musculosquelettiques, impacts sur la vue, perturbation des rythmes circadiens comme le rythme veille-sommeil, effets sur les comportements alimentaires et addictifs, accidentologie, impact sur la santé mentale ;
la vie sociale : modifications de l’articulation entre la vie professionnelle et la sphère socio-familiale ;
l’activité de travail : augmentation des exigences en matière de réactivité et de disponibilité, développement d’horaires atypiques de travail, modifications des dynamiques relationnelles entre collègues et avec la hiérarchie, évolution de la satisfaction et de l’implication au travail, etc.
Dans ce dernier domaine, l’appréciation de la charge réelle du temps de travail, par tous les maillons de la chaîne, reste problématique. « Le contenu du travail réel est parfois difficile à percevoir, que ce soit pour les chercheurs qui investiguent le sujet, les managers qui encadrent des travailleurs à distance ou encore les travailleurs qui modifient sans toujours s’en apercevoir leur organisation, ce qui est susceptible d’induire une charge cognitive et professionnelle supplémentaire », développe l’Anse dans un avis publié ce lundi.
Donner une définition stricte au télétravail
« L’identification des risques liés au télétravail, à des fins de prévention, nécessite la mobilisation de l’ensemble des acteurs – employeurs, spécialistes de la prévention des risques professionnels, travailleurs et leurs représentants – afin de faire émerger des connaissances et des solutions qui tiennent compte de la réalité des situations de travail et des activités des télétravailleurs », plaise l’Anses. Un travail complexe alors que qu’il existe de très nombreuses formes et modalités de télétravail.
Ainsi, l’agence recommande de donner une définition stricte au télétravail, qui fera référence pour les travaux de recherche. Elle recommande en outre de mener des études quantitatives et qualitatives afin de documenter le télétravail (enquêtes menées par les acteurs de la statistique publique, surveillance épidémiologique, approche pluridisciplinaire afin d’analyser l’ensemble des déterminants).
Plusieurs paramètres devraient spécifiquement et systématiquement être documentés : le caractère subi ou choisi du télétravail, le statut familial, le genre, la catégorie socioprofessionnelle, l’accès à la médecine du travail, etc.
L’Anses rappelle en outre aux employeurs leurs obligations à l’égard de l’ensemble des salariés, les mêmes que ceux-ci soient télétravailleurs ou non, afin d’assurer leur sécurité et de protéger la santé physique et mentale de chacun.
Selon les chiffres disponibles sur Statista.com, 33 % Des salariés français télétravaillaient au moins une fois par semaine en 2023.