Résistance aux antimicrobiens : une urgence mondiale, selon un groupe d’experts
« Non contrôlée, la résistance aux antimicrobiens réduira l’espérance de vie et entraîner des dépenses de santé et des pertes économiques sans précédent. » C’est le constat alarmant dressé, jeudi 4 avril dans un communiqué de presse, par le Groupe de direction mondial sur la résistance aux antimicrobiens, relayé par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS).
Les antimicrobiens – antibiotiques, antifongiques, antiviraux, antiparasitaires – sont des médicaments utilisés pour prévenir et traiter les infections chez les êtres vivants – les hommes, les animaux et les végétaux. La résistance aux antimicrobiens (RAM) survient lorsque ceux-ci sont utilisés de manière excessive ou à mauvais escient. Les bactéries, virus, champignons et parasitent, s’adaptent alors au médicament et évoluent de manière à y résister plus tard. Ils s’adaptent. « En conséquence, les médicaments perdent leur efficacité et les infections persistent dans l’organisme, augmentant le risque de transmission à d’autres personnes », résume l’OMS.
Les enfants de moins de 5 ans particulièrement touchés
La RAM serait d’ores et déjà l’une des principales causes de décès dans le monde, directement responsable de 1,27 million de décès par an, selon le groupe d’experts. Un décès sur cinq concernerait des enfants de moins de cinq ans, principalement dans les pays à revenus faibles ou intermédiaires.
L’étude économique menée par ces experts montre qu’à la catastrophe humanitaire s’ajoutera une catastrophe économique. Ils affirment qu’à l’échelle mondiale, 1,8 année d’espérance de vie sera perdue d’ici 2023. L’étude estime à 412 milliards de dollars (380 milliards d’euros) par an les coûts de santé supplémentaires et 443 milliards de dollars (409 milliards d’euros) par an la perte de productivité de la main d’œuvre. Outre ce sombre tableau, elle propose des solutions qui coûteraient en moyenne 46 millions de dollars par an, mais rapporteraient 13 dollars pour chaque dollar dépensé d’ici 2050.
Recherche, surveillance, prévention, coordination
Le groupe d’experts appelle ainsi à une forte mobilisation des pays membres de l’ONU. « Ces données laissent présager un avenir dévastateur si nous ne prenons pas des mesures plus audacieuses maintenant », a déclaré la présidente du groupe d’experts de la RAM, Mia Amor Mottley, Première ministre de la Barbade. « C’est pourquoi le groupe de direction mondial formule des recommandations et propose des objectifs pour conduire une réponse mondiale robuste à la RAM et sauver des millions de vies. »
Des directives sont exposées, pour, notamment, mieux financer la recherche et la mise au point de nouveaux médicaments, coordonner une réponse mondiale et renforcer la surveillance de la RAM. Et, « parce que la prévention est la pierre angulaire de la réponse à la RAM, le GLG recommande que les pays mettent en œuvre des stratégies pour prévenir les infections dans la santé humaine et animale et dans les écosystèmes alimentaires, végétaux et environnementaux afin de réduire le besoin d’antimicrobiens », note les experts.
Des objectifs exigeants
Ils fixent plusieurs objectifs à atteindre d’ici 2030 :
Réduire de 10 % le nombre de décès humains dus à la RAM ;
consommer à 80 %, sur la totalité des antibiotiques, des antibiotiques du groupe ACCESS. Ces médicaments, comme l’amoxicilline, « sont efficaces dans un large éventail d’infections courantes et présentent un risque relativement faible d’engendrer une résistance », explique l’OMS ;
réduire d’au moins 30 à 50 % la quantité d’antimicrobiens utilisés dans l’agroalimentaire ;
en finir avec le recours aux antimicrobiens de première importance pour l’Homme chez les animaux quand le but n’est pas de soigner et chez les plantes quand le but n’est pas phytosanitaire (exemple : le recours aux antibiotiques pour la croissance).
Source : OMS, Groupe de direction mondial sur la résistance aux antimicrobiens
Ecrit par Dorothée Duchemin – Edité par : Vincent Roche
Résistance aux antimicrobiens, antibiotiques, antibiorésistance