Migraine : les enfants aussi
Chez l’enfant migraineux, l’absentéisme récurrent, avec ses conséquences lourdes sur les apprentissages et la sociabilisation, peut mener à la déscolarisation voire au renoncement aux études supérieures, entre autres. Pourtant, les conséquences délétères de cette maladie neurologique fréquente, sur les enfants et leur avenir, sont largement méconnues. Finalement, la migraine est assez mal comprise, et le corps enseignant, les encadrants, y compris les infirmiers scolaires, se trouvent souvent démunis. C’est pourquoi l’association La Voix des Migraineux lance une campagne pour sensibiliser à la scolarité des enfants migraineux et rappelle l’existence d’un dispositif légal : le PAI (Projet d’Accueil Individualisé) proposé par l’Éducation Nationale. Celui-ci permet d’organiser au mieux la vie de l’enfant dans l’établissement en précisant ses besoins thérapeutiques.
8 % des enfants sont d’authentiques migraineux
L’Organisation Mondiale de la Santé reconnaît la migraine comme la deuxième maladie la plus invalidante au monde. Alors qu’elle commence enfin à être considérée comme une maladie à part entière lorsqu’elle touche les adultes – elle s’exprime surtout entre 20 et 50 ans – les enfants sont souvent oubliés, alors qu’ils en sont affectés eux-aussi et parfois dès leur plus jeune âge. Une étude estime à 8 % la prévalence de la migraine chez les enfants et les adolescents français. Une autre étude l’évalue à 9 % chez les filles et 7 % chez les garçons à l’échelle mondiale.
Des symptômes différents de ceux des adultes
Les mécanismes, complexes, de la migraine ne sont pas entièrement compris. Le cerveau des migraineux semble être hypersensible à des stimuli qui sont anodins pour les personnes non migraineuses. « Un cerveau génétiquement déterminé pour être migraineux est un cerveau – précisément l’hypothalamus qui est le générateur des crises – très sensible aux changements (sommeil, repas, émotions, rythme de vie, activités diverses…), ajoute le Pr Anne Donnet, neurologue au Centre d’évaluation et de traitement de la douleur (CHU de Marseille), et notamment aux variations hormonales. »
Le piège est que chez les enfants, la migraine se manifeste par des symptômes parfois différents de ceux des adultes, tels qu’une pâleur précédant souvent des douleurs abdominales, des céphalées souvent sévères, une phonophobie (le son est insupportable), une photophobie (la lumière également) et une aura dans 30% des cas (vision floue, éclairs, picotements, difficultés de langage, faiblesse, engourdissement, etc.).
Autre différence, la durée moyenne d’une crise de migraine est généralement plus courte chez l’enfant que chez l’adulte (2 heures contre 4 heures en moyenne), et la douleur est plutôt bilatérale, affectant les deux tempes ou les deux parties du front simultanément.
Selon des données provenant du Centre de Douleurs Chroniques de l’Hôpital de la Timone à Marseille, un enfant migraineux sur deux présente plus d’une crise par mois, et 78 % d’entre eux éprouvent une intensité de crise modérée à assez élevée. Par ailleurs, plus de 40 % ont des nausées ou des vomissements lors des crises, et plus d’un tiers ressentent des douleurs abdominales.
La fameuse « crise de foie » est en réalité une migraine
Les enfants peuvent également présenter des tableaux cliniques qui ne se traduisent pas par une céphalée, précise la Société française d’étude des migraines & céphalées mais sous la forme d’autres symptômes évoluant également en crises : vertige bénin récurrent, douleurs abdominales répétées (« migraine abdominale »), vomissement cycliques, etc. ; pour toutes ces formes de « migraine sans céphalée », le diagnostic de migraine ne sera évoqué que lorsque les autres causes de ces tableaux auront été éliminées. Ce que l’on appelait avant « crises de foie » ou « crises d’acétone » sont considérées aujourd’hui comme de véritables crises de migraine.
La migraine n’est pas un simple mal à la tête
La Voix des Migraineux, qui reçoit de nombreux témoignages de parents d’enfants migraineux en détresse, milite pour la création et la validation d’un Projet d’Accueil Individualisé (PAI) spécifique à la migraine. Ce PAI type « Migraine » inclurait la conduite à tenir en cas de crise (traitement de la crise à donner, comportements à adopter comme isoler l’enfant dans un espace calme et lumineux et lui donner à boire, etc.) et imposerait les aménagements nécessaires pour limiter les facteurs déclencheurs dans l’environnement scolaire et extra-scolaire (cantine, garderie, étude). A suivre.
Pour en savoir plus : La Voix des Migraineux, Une Association pour la Migraine