Mayotte : 85 cas de choléra recensés et un nouveau foyer épidémique
Santé publique France publie ce vendredi 17 mai les derniers chiffres de l’épidémie de choléra qui sévit actuellement à Mayotte. L’épidémie, en cours depuis février 2024 dans les Comores voisins, ont gagné l’archipel français avec un premier cas déclaré le 18 mars. Au 15 mai, 85 cas avaient été signalés, dont 68 cas autochtones et 17 importés des Comores ou du continent africain. Un premier décès, celui d’un enfant de 3 ans a été enregistré. Sept malades ont dû être admis en réanimation.
Risque de transmission sur tout le territoire
Alors que la majorité des cas était jusqu’ici circonscrite à la commune de Koungou, un nouveau foyer a été signalé le 14 mai sur la commune de Mtzangamouji. Selon Santé publique France, la situation aux Comores et à Koungou, « exposent Mayotte à un risque de transmission locale sur tout le territoire, en particulier dans d’autres quartiers précaires ».
Pour rappel, le choléra est une toxi-infection digestive aiguë due à l’ingestion d’eau ou d’aliments contaminés par les bacilles Vibrio cholerae des sérogroupes O1 et O139 toxinogènes (vibrions cholériques). Ce sont les mesures d’assainissement et d’hygiène collective qui ont permis la disparition du choléra en France, hors Guyane et Mayotte.
Retracer les chaînes de transmission
Dans l’archipel, les populations sont confrontées depuis des mois à une crise de l’eau et un accès à l’eau potable et courante extrêmement difficile. A Koungou, certains habitants consomment de l’eau de rivière et nombre d’entre eux sont confrontés à des défauts d’assainissement – absence d’évacuation des eaux usées, partage de latrines – soit les principaux risques de diffusion de la maladie.
Santé publique France mène des enquêtes auprès des personnes infectées et de leur entourage afin de retracer la chaîne de transmission et en éviter de nouvelles. Des stocks de vaccins ont été envoyés depuis la métropole jusqu’à Mayotte, où au 13 mai, 4 456 personnes cas contacts ont pu être vaccinées.
L’épidémie classée niveau d’urgence le plus élevé par l’OMS
La situation à Mayotte n’est pas isolée. Le 23 avril, l’Organisation mondiale de la santé estimait que la flambée de choléra s’était considérablement aggravée dans le monde. Dès janvier 2023, « sur la base du nombre d’épidémies et de leur expansion géographique, ainsi que de la pénurie de vaccins et d’autres ressources », l’OMS avait classé la résurgence du choléra en catégorie 3, soit le niveau d’urgence le plus élevé.
« Selon l’OMS, 473 000 cas ont été signalés en 2022, soit deux fois plus qu’un an auparavant. Des données préliminaires indiquent que plus de 700 000 cas ont été signalés en 2023 », rapportait les Nations Unis en avril. La situation devrait encore s’aggraver en 2024. « Du 1er janvier au 28 avril 2024, un total cumulé de 145 900 cas de choléra et 1 766 décès ont été signalés dans 24 pays répartis dans cinq régions de l’OMS, la Région africaine enregistrant les chiffres les plus élevés ». En avril, ce sont 23 pays qui signalaient des épidémies de choléra. Parmi les causes de cette flambée, l’OMS pointe les effets du changement climatique ; des sécheresses et inondations fréquentes dans les pays d’Afrique de l’Est et d’Afrique centrale.
Une pénurie de vaccins
Autre difficulté, les vaccins contre le choléra, produits seulement en fonction des besoins, connaissent une pénurie critique. « Depuis janvier 2023, les demandes de VCO (Vaccin anticholérique oral, ndlr) ont fortement augmenté, avec 82 millions de doses demandées par 15 pays, soit près du double des 46 millions de doses produites au cours de cette période », note l’OMS. Le stock, totalement épuisé en mars, comptait 3,2 millions de doses au 6 mai.
Actuellement, les deux vaccins oraux disponibles contre le choléra sont uniquement produits par le laboratoire sud-coréen EuBiologicals. Un troisième, du même laboratoire, plus simple à fabriquer et moins coûteux, a été préqualifié fin avril par l’OMS. Malgré ces efforts sur les vaccins, pour l’OMS, « l’eau potable, l’assainissement et l’hygiène sont les seules solutions durables et à long terme pour mettre fin à l’épidémie de choléra et prévenir d’autres épidémies ».