Légalisation du cannabis récréatif : pourquoi l’Académie de médecine réitère-t-elle son opposition ?

Légalisation du cannabis récréatif : pourquoi l’Académie de médecine réitère-t-elle son opposition ?

L’Académie nationale de médecine a répété, dans un communiqué du 9 avril 2025, son opposition à une éventuelle légalisation de l’usage récréatif du cannabis, nouveaux arguments à l’appui. Alors que la question de cette légalisation s’invite régulièrement dans le débat public, l’Académie justifie sa position à l’aide de plusieurs études menées dans d’autres pays où le cannabis est légalisé, notamment au Canada depuis 2018.

Des risques d’intoxications pédiatriques

Elle cite par exemple une étude publiée en 2023 dans la revue Jama, qui a étudié les intoxications pédiatriques, de 0 à 9 ans, dues aux cannabis. Les taux d’hospitalisations d’enfants (3,5 ans en moyenne) « avaient plus que doublé dans les provinces (canadiennes) exposées », notent les auteurs. « Cette étude transversale a révélé qu’après la légalisation du cannabis, les provinces autorisant la vente de produits comestibles au cannabis ont connu une augmentation beaucoup plus importante des hospitalisations pour intoxications pédiatriques non intentionnelles que la province interdisant ces produits », poursuivent-ils.

Des risques accrus de schizophrénie

Toujours dans la revue Jama, une étude publiée le 4 février 2025 s’est penchée sur les risques de schizophrénie liés à l’usage du cannabis. Selon les résultats, sur une cohorte de plus de 1,3 million de personnes, « la fraction de troubles liés à la consommation de cannabis associés à la schizophrénie, attribuable à la population, a augmenté de manière significative, passant de 3,7 % avant la légalisation à 10,3 % après la légalisation ».

Des risques au volant

Une autre étude, publiée dans The New England Journal of Medicine en 2022, concerne cette fois la proportion d’automobilistes après un accident de la route contrôlé positif au THC. Et selon les résultats, « après la légalisation du cannabis, la prévalence des conducteurs modérément blessés présentant un taux de THC d’au moins 2 ng par millilitre dans les centres de traumatologie participants de la Colombie-Britannique (Canada) a plus que doublé (passant de 3,8 % à 8,6 %) ». Idem pour un taux supérieur à 0 tandis que le taux supérieur à 5 ng avait lui triplé (de 1,1 % à 3,5 %).

Une hausse de la consommation

L’Académie nationale de médecine avance en outre que le nombre d’hospitalisations dues au cannabis chez les adultes en Ontario a augmenté, entre 12 et 22 %, après la légalisation.

Quant au niveau de consommation, elle a augmenté selon une étude réalisée aux Etats-Unis et publiée en 2024 dans la revue Addiction. « De 1992 à 2022, le taux par habitant de déclaration d’une consommation quotidienne ou quasi quotidienne a été multiplié par 15 », notent les auteurs. « En 2022, les consommateurs de cannabis au cours du mois précédent étaient près de quatre fois plus susceptibles de déclarer une consommation quotidienne ou quasi quotidienne (42,3 % contre 10,9 % en 1992) et 7,4 fois plus susceptibles de déclarer une consommation quotidienne (28,2 % contre 3,8 %) ».

Les académiciens recommandent de maintenir l’interdiction en France de la vente et de la consommation du cannabis « compte tenu de tous ses effets toxiques » et « d’amplifier les programmes de prévention et d’information sur la toxicité de cette drogue ».

A noter : cet avis survient après la publication en février 2025 d’un rapport rédigé par les députés Antoine Léaument (La France insoumise) et Ludovic Mendes (Renaissance) qui pointe l’échec des politiques publiques contre le narcotrafic. Parmi leurs 63 recommandations, ils proposent une légalisation encadrée de la consommation récréative du cannabis dans un objectif de santé publique et de lutte contre les réseaux criminels, accompagnée de mesures de prévention spécifiques pour les mineurs et les jeunes adultes, sans publicité ni vente en ligne.