Légalisation du cannabis récréatif : où en est la France ?
Comme son nom tend à l’indiquer, le cannabis récréatif renvoie à l’utilisation de la marijuana pour le plaisir plutôt que pour soulager certains symptômes. En cela il se différencie de l’usage thérapeutique. Si certains pays, comme l’Allemagne le 1er avril prochain, prennent le parti de sa légalisation, en France, la situation est plus timide. Alors qu’en janvier 2023, le Conseil économique, social et environnemental prônait une commercialisation encadrée du cannabis, plusieurs sons de cloche se font entendre, en faveur ou en défaveur de la légalisation.
La santé, une priorité
Interrogés sur la représentation qu’ils ont des drogues, les adolescents attribuent volontiers au cannabis une image positive. Décrit comme « plaisant », « convivial », voire « naturel », le cannabis est aussi perçu comme moins dangereux et addictif que la nicotine. Pourtant, les preuves scientifiques s’accumulent sur les risques pour la santé, notamment celle des jeunes, dont le cerveau est en maturation jusqu’à 25 ans environ.
Ainsi, de nombreuses sociétés savantes s’opposent encore à la légalisation du cannabis. « Ce serait une grave erreur sanitaire », lançait l’Académie nationale de médecine en octobre 2023. Laquelle rappelait que « la toxicité du principal constituant psychotrope de la drogue, le tétrahydrocannabinol (THC) est parfaitement établie : toxicité physique supérieure à celle du tabac (cancers, infarctus, troubles du rythme cardiaque, AVC, artérites…), toxicité psychique (troubles cognitifs et anxiodépressifs, syndrome amotivationnel, désinhibition, induction ou aggravation de la schizophrénie…), effets sur la grossesse et sur la descendance, modifications épigénétiques. Il est aussi un inducteur de violences familiales, professionnelles, routières (avec 605 morts en 2021). »
L’interdiction n’empêche pas l’usage
En matière de répression et de consommation, la France fait face à un paradoxe. Alors que le pays possède l’une des législations les plus strictes en matière de stupéfiant (datant de 1970), la consommation de cannabis y est l’une des plus élevée en Europe.
Interrogé par le site Le club des juristes, Renaud Colson, maître de conférences en Droit privé et sciences criminelles à l’Université de Nantes confirme que « la prohibition a peu d’effet sur les niveaux d’usage. Mais elle s’accompagne de nombreux effets pervers au nombre desquels la création d’un vaste marché criminel, la circulation de produits frelatés, et la marginalisation des consommateurs. Ce constat explique que de plus en plus d’Etats réglementent la production, la distribution et l’usage de cannabis à des fins récréatives. »
Selon lui, en France, entre l’expérimentation du cannabis thérapeutique et l’autorisation d’un cannabis « light » (CBD), « la légalisation est déjà en marche. (Et si) l’état du débat français (…) semble aujourd’hui exclure toute levée de l’interdit, le sens de l’histoire ne fait guère de doute ». Si cela était le cas, il conviendrait de réfléchir à une solution alliant logique de marché et impératifs de santé publique.