Le vapotage passif présente-t-il un risque ?
En 2022, 41,2 % des 18-75 ans déclaraient avoir déjà expérimenté la cigarette électronique. La prévalence du vapotage quotidien s’élevait alors à 5,5 %, selon l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives.
Confirmons-le d’emblée, le vapotage passif est largement moins toxique que le tabagisme passif. Pourquoi ? « Le fumeur de cigarettes absorbe 1 milliard de particules mais laisse 5 autres milliards se diffuser dans la pièce lorsqu’il ne tire pas sur sa cigarette et que celle-ci se consume. L’essentiel du tabagisme passif est lié à cette fumée secondaire, qui s’échappe de la cigarette quand le fumeur ne tire pas dessus », explique le Pr Bertrand Dautzenberg, pneumologue et tabacologue à Paris.
Ainsi, des particules de 90 nanomètres s’échappent d’une cigarette – du goudron, des nitrosamines, du formaldéhyde et autres aldéhydes responsables du cancer des poumons chez les fumeurs. Pour leur part, les e-liquides ne contiennent quasiment pas de nitrosamines, parfois seulement à l’état de traces. « Ils ne contiennent pas non plus de goudron, qui constitue plus de 90 % de la masse des substances cancérogènes dans la fumée de cigarettes. En fonctionnement normal, on retrouve aussi moins d’aldéhydes que dans la fumée de cigarettes qui représentent 1 % de la masse cancérogène de la fumée du tabac. Il n’y a quasiment aucun cancérogène dans la vape ou 99,5 % de moins que dans la fumée de cigarette », développe le Pr Dautzenberg.
Un temps d’émission beaucoup plus court
Avec une vapoteuse, qui donc ne se consume pas, seule la vapeur exhalée par le vapoteur se retrouve dans l’air. « Imaginons qu’un vapoteur tire 15 fois sur sa cigarette électronique, ce qui est le nombre moyen de bouffées avec une e-cigarette. On se retrouve alors avec 30 à 50 secondes d’émission au lieu de 5 minutes, soit 10 fois moins de temps d’émission par rapport à une cigarette qui se consume », démontre le tabacologue.
De plus, contrairement à la fumée de cigarette, la vapeur de la cigarette électronique ne contient pas de microparticules solides, lesquelles sont responsables d’effets délétères sur l’appareil respiratoire et cardiovasculaire. « Il s’agit de fines gouttelettes qui se transforment en gaz et qui se dissipent très rapidement. Plus rien ne flotte dans l’air 1 minute après, contrairement à la fumée du tabac, dont les particules solides peuvent rester dans une pièce plusieurs heures après la combustion d’une cigarette », met en avant le Pr Dautzenberg.
Zoom sur la nicotine
Si le match tabagisme passif versus vapotage passif plaide largement en faveur d’un moindre danger du vapotage, des substances sont toutefois effectivement relâchées dans l’air lorsqu’un vapoteur exhale la vapeur. Il s’agit de la nicotine notamment, pour les liquides de e-cigarettes qui en contiennent.
En 2015, une étude norvégienne pointait des taux de nicotine similaires dans l’atmosphère entre la vape et la cigarette. « Les niveaux de nicotine ambiants en cas d’exposition passive à l’aérosol de cigarettes électroniques peuvent déboucher sur des niveaux de nicotine dans le sang à peu près aussi élevés que chez un fumeur passif de cigarettes classiques », soulignait ce travail. « L’Institut norvégien de la santé publique estime que le vapotage passif peut affecter le système cardiovasculaire », relayait alors Tabac info service. Il pourrait en outre créer une tolérance à la nicotine, le premier pas vers la dépendance. Mais pour Bertrand Dautzenberg, « cet enchainement de faits reste encore à démontrer ».
Pour rappel, la nicotine, si elle est responsable du phénomène de dépendance et par conséquent de l’effet de manque à l’arrêt du tabac, ne compte pas parmi les substances toxiques et cancérigènes contenus dans une cigarette.
Les petits espaces clos particulièrement à risque
« On retrouve effectivement de la nicotine et d’autres substances libérés par la cigarette électronique, mais jamais au niveau de ce qui est décrit dans l’étude suédoise. Le risque est toutefois plus élevé dans les petits espaces clos et fermés, comme les voitures, par exemple », souligne Bertrand Dautzenberg.
Pour limiter l’exposition de son entourage au vapotage passif, Tabac info service recommande d’éviter d’utiliser une vapoteuse dans une pièce fermée et en présence de jeunes enfants, de s’assurer que la pièce est bien ventilée le cas échéant, de ne pas vapoter en voiture en présence d’enfants et de non-fumeurs et de ne jamais vapoter dans les chambres d’enfants.
Le Pr Dautzenberg indique enfin qu’il est possible de réduire considérablement les risques liés à l’exposition à la nicotine pour l’entourage d’un vapoteur. « Il faut choisir une petite vapoteuse, inspirer la vapeur et attendre 5 secondes avant de l’expirer. La quantité de nicotine rejetée sera alors minime », recommande l’expert.
A noter : pour l’heure, faute de données « concluantes », la cigarette électronique n’est pas recommandée comme un moyen de sevrage du tabac pour la Haute autorité de santé. Le dernier avis du Haut conseil de la santé publique va dans le même sens : « les preuves sont insuffisantes pour proposer les SEDEN (système électronique de délivrance de la nicotine) comme aides au sevrage tabagique dans la prise en charge des fumeurs par les professionnels de santé ». En revanche, La Société Francophone de Tabacologie a pour sa part réaffirmé l’intérêt potentiel de la vape dans le sevrage tabagique. Selon elle, « la cigarette électronique est probablement une aide efficace pour arrêter de fumer. Elle doit dans ce cas être utilisée de façon transitoire (en l’absence de donnée précise sur ses effets à long terme) en vue de l’arrêt de la consommation tabagique. Elle doit être proscrite chez les non-fumeurs. »