Diabète et hypertension : pourquoi faut-il limiter le sucre dans la petite enfance ?

Diabète et hypertension : pourquoi faut-il limiter le sucre dans la petite enfance ?

Les 1 000 premiers jours d’un enfant peuvent influencer le reste de sa vie. Une alimentation pauvre en sucre in utero et les deux premières années, soit durant 1 000 jours à partir de la conception, réduit considérablement le risque de maladies chroniques à l’âge adulte. Publiée dans la revue Science le 31 octobre, l’étude s’intéresse à la période de rationnement en sucre introduit en Grande-Bretagne de 1942 jusqu’en septembre 1953.

Selon les chercheurs de l’USC Dornsife College of Letters, Arts and Sciences, de l’Université McGill de Montréal et de l’Université de Californie à Berkeley, ce rationnement a permis de limiter la consommation de sucre à des niveaux conformes aux directives actuelles. En revanche, la consommation a quasiment doublé après le rationnement. « Les régimes alimentaires semblaient en fait être conformes aux directives actuelles établies par le ministère américain de l’Agriculture et l’Organisation mondiale de la santé, qui recommandent de ne pas ajouter de sucre aux enfants de moins de deux ans et de ne pas dépasser 12 cuillères à café (50 g) de sucre ajouté par jour pour les adultes », précisent les auteurs dans un communiqué.

Un essai à l’échelle d’un pays

Ainsi, les enfants qui ont expérimenté les restrictions au cours des 1 000 premiers jours après leur conception présentaient à l’âge adulte 35 % de risques en moins de développer un diabète de type 2 et jusqu’à 20 % de risques d’hypertension en moins. Pour parvenir à ces résultats, les chercheurs ont analysé les données de la UK Biobank, une base de données biomédicale à grande échelle, qui contient des millions d’échantillons de sang, de salive et d’urine ainsi que des dossiers médicaux, contenant les antécédents et modes de vie des volontaires. Ils ont ainsi pu comparer les résultats de santé à long terme (plus de 50 ans plus tard) des adultes conçus au Royaume-Uni juste avant et après la fin du rationnement du sucre.

Une aubaine pour les scientifiques puisqu’il est rare de pouvoir étudier les données d’un grand nombre de personnes exposées du jour au lendemain à deux environnements alimentaires très différents. Pendant le rationnement, la consommation de sucre était en moyenne de 8 cuillères à café soit 40 grammes de sucre par jour. A la fin du rationnement, la consommation de sucre a bondi pour atteindre 16 cuillères à café, soit 80 grammes de sucre par jour. « Si le fait de vivre la période de restriction du sucre pendant les 1 000 premiers jours de la vie a considérablement réduit le risque de développer un diabète et une hypertension, pour ceux qui ont été diagnostiqués ultérieurement avec l’une ou l’autre de ces maladies, l’apparition de la maladie a été retardée de quatre ans et de deux ans, respectivement », soulignent les auteurs. La période la plus significative semble être celle après la naissance. L’exposition in utero à elle seule a suffi à réduire les risques, mais la protection contre les maladies chroniques augmentait après la naissance, après l’introduction des aliments solides.

Trop de sucres ajoutés dans les aliments pour bébés

Alors que le diabète de type 2 est l’une des maladies chroniques les plus répandues dans le monde, les auteurs déplorent en effet une consommation de sucres ajoutés en quantité excessive dès la petite enfance, en premier lieu dans les préparations pour bébés et aliments dédiés aux enfants comme certains biscuits et boissons, beaucoup trop riches en sucre.

« Les parents ont besoin d’informations sur ce qui fonctionne, et cette étude leur fournit des preuves que la réduction de la consommation de sucre ajouté au début de la vie est une étape importante vers l’amélioration de la santé des enfants tout au long de leur vie », a déclaré Claire Boone, co-auteure de l’étude, spécialiste en économie de la Santé à l’Université McGill.

Paul Gertler, co-auteur et économiste à l’Université de Californie à Berkeley, ajoute : « Le sucre au début de la vie est le nouveau tabac, et nous devrions le traiter comme tel en obligeant les entreprises alimentaires à reformuler les aliments pour bébés avec des options plus saines, en réglementant le marketing et en taxant les aliments sucrés destinés aux enfants. »