Dépistage organisé du cancer du poumon : où en est la France ?
Une étape franchie dans la mise en place du dépistage organisé du cancer du poumon en France, réclamée par de nombreux professionnels. Le 11 juillet, l’Institut national du cancer a publié l’appel à projets pour la mise en place d’un programme pilote de dépistage national. « Celui-ci devra évaluer le taux de détection de ces cancers dans la population dépistée et déterminer les conditions et modalités de mise en œuvre les plus sûres et efficaces pour la population cible », note l’Inca dans un communiqué. Ce projet de recherche ne devra pas durer plus de 60 mois, l’Inca vise une éventuelle généralisation du dépistage organisé du cancer du poumon d’ici 5 à 10 ans.
« Il nous faut encore répondre à de nombreuses questions qui nous permettront de développer le dépistage le plus efficace et le plus sûr possible pour les populations asymptomatiques auquel il s’adresse. Et ce programme de recherche nous y aidera. Nous le savons, le tabac est l’ennemi numéro 1 de ce cancer ; si le dépistage peut nous permettre de repérer la maladie à un stade plus précoce, l’arrêt du tabac reste la meilleure arme pour lutter contre les nombreux cancers qu’il induit », a justifié le Pr Norbert Ifrah, président de l’Institut national du cancer.
Un cancer de mauvais pronostic
En 2021, 30 400 personnes sont décédées d’un cancer du poumon et 52 777 nouveaux cas ont été détectés en 2023. Si son incidence semble stabilisée chez les hommes avec une baisse moyenne de 0,5 % par an, elle augmente chez les femmes de 4,3 % par an. Très souvent détecté à un stade avancé ou à un stade métastatique – quand plus aucun traitement curatif n’est possible – le cancer du poumon est de mauvais pronostic avec une survie à 5 ans de 20 %. L’engagement de la stratégie décennale contre les cancers 2021-2030 est de favoriser les diagnostics précoces afin d’améliorer le pronostic de ce cancer.
Ce programme pilote qui sera retenu devra documenter en vie réelle l’impact de ce dépistage avant une éventuelle généralisation. Durant cette phase de test, il s’agira de « déterminer plus spécifiquement la sensibilité, la spécificité, la valeur prédictive positive du programme de dépistage ainsi que le pourcentage de surdiagnostic et de recours aux examens complémentaires invasifs et le risque de cancers radio-induits lié à une exposition scanographique répétée ». Des objectifs secondaires ont aussi été établis : « permettre de tester les modalités d’invitation et l’adhésion des populations ciblées, de mesurer le taux de complications des investigations invasives, l’impact sur les filières de soins impliqués et l’adhésion, ainsi que des déterminants, à la proposition d’aide à l’arrêt du tabac ».
Quelle population cible ?
Le dépistage s’adressera aux personnes âgées de 50 à 74 ans, qu’elles soient fumeuses ou anciennes fumeuses depuis moins de 15 ans. Seront également pris en compte la durée et la quantité de consommation. Sont ainsi éligibles les personnes dont la consommation est estimée à 20 paquets/année (1 paquet par jour pendant 20 ans), 15 cigarettes par jour durant 25 ans et 10 cigarettes par jour durant 30 ans.
Concernant l’examen de référence, il s’agit du scanner thoracique à faible dose également scanner low dose ou LD. Cette technique d’imagerie se distingue du scanner thoracique habituel car il s’agit d’un scanner non injecté et faiblement irradiant. L’intervalle entre les deux premiers examens sera d’un an, puis tous les deux ans.
En décembre 2022, le Conseil de l’Union européenne mettait à jour ses recommandations sur le dépistage du cancer du poumon, estimant que « les pays devraient étudier la faisabilité et l’efficacité du dépistage par tomographie assistée par ordinateur à faible dose ». Dans un avis récemment communiqué le collectif Ensemble Nous Poumons se réjouissait de la l’appel à candidatures de l’Inca, appelant « à une accélération de la mise en place du dépistage ». Le collectif, composé d’experts de la prise en charge du cancer du poumon, rappelait que tels programmes étaient déjà lancés ailleurs en Europe. Italie, Hongrie, Slovaquie, Allemagne. Royaume-Uni. « À terme, ces pays rejoindront probablement la Croatie, la Pologne et la République Tchèque où un programme national existe déjà. »