Consentement éclairé : c’est quoi, un patient bien informé ?
Anne-Sophie Hutin est la présidente de la Commission de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (CCI) d’Ile-de-France.
Vous devez voir passer de nombreux dossiers litigieux portés par des patients qui contestent avoir été correctement informés sur une chirurgie, un traitement médical, un choix thérapeutique… ?
Oui, c’est une critique fréquente mais le nombre de réclamations n’évolue pas nécessairement ces dernières années. Le principal reproche des patients est le manque d’explications concernant le geste chirurgical précis qui va être réalisé (intervention en deux temps, possibilité d’extension du geste, nouvelle technique) et les alternatives thérapeutiques.
Or, avec la loi dite « Kouchner » du 4 mars 2002, l’obligation d’information du médecin est devenue un véritable « droit de savoir » pour le patient. Il s’agit alors pour le médecin de favoriser une véritable alliance thérapeutique dans laquelle le patient est invité à jouer un rôle actif dans sa santé, en prenant pleinement part aux décisions qui le concernent. Or pour prendre en compte la volonté du patient, il faut que son consentement ait été donné en toute connaissance de cause.
Que recouvre réellement le consentement éclairé ?
Le consentement éclairé du patient, qui doit toujours être recueilli, repose sur la qualité de l’information qui lui a été délivrée par son médecin sur la prise en charge proposée. Son consentement repose donc sur sa bonne compréhension de tous les aspects de l’acte médical qui lui est préconisé. En cas de chirurgie, le patient est invité à signer un formulaire de consentement éclairé par lequel il manifeste clairement son accord pour la réalisation d’une intervention, après un entretien individuel avec son médecin.
Se contenter pour le médecin de remettre au patient une fiche sans fournir d’informations orales satisfait-il à l’obligation d’information ?
Non, et en cas de litige, ce qui est vérifié en premier par le juge est que des informations personnalisées lui ont été données oralement (par exemple, les bénéfices et risques de la chirurgie). Une fiche peut venir compléter cette information orale, mais ne peut la remplacer. On se réfère à ce qui est tracé, consigné dans le dossier médical, en particulier dans les comptes-rendus de consultations et les lettres d’adressage.
Le médecin peut de manière très utile voir avec son patient les informations contenues dans la fiche d’information générale, pour un type d’intervention donné, et donner à cette occasion des précisions à son patient.
Sur quoi porte l’information médicale que doit recevoir tout patient pour prendre des décisions concernant sa santé ?
En pratique, l’information recouvre les données sur l’état de santé du patient, les investigations (bilans, imagerie…), les traitements, leur utilité, leur urgence éventuelle, les conséquences, et les risques associés, et incluent les alternatives thérapeutiques et les conséquences sur la santé en cas de refus du traitement proposé.
L’information doit être délivrée dans de bonnes conditions et être claire et complète. Délivrer cette information incombe à tout professionnel de santé dans le cadre de ses compétences. La transmission de l’information est personnelle au médecin qui effectuera le geste et ne peut être sous-traitée, par exemple, par une infirmière. Et même si celle-ci est très bien formée.
Que vaut la signature d’une fiche d’information ?
L’information du patient sur l’acte de soin préconisé et ses risques doit toujours être délivrée dans le cadre d’un entretien individuel (« colloque singulier »). L’information doit être donnée oralement car elle doit être individualisée et permettre de répondre aux questions spécifiques du patient avant qu’il ne signe le consentement éclairé. En revanche, la signature d’une fiche d’information en elle-même, qui est « standardisée », n’est pas indispensable.
Concernant une chirurgie, quelles sont les informations indispensables ?
L’information ne se limite pas à la nature de l’intervention et à ses risques. Selon les dossiers, l’information attendue peut aller jusqu’à la technique que le praticien envisage d’employer dans les chirurgies les plus délicates pour lesquelles il n’existe pas de consensus. C’est aussi le cas s’il est dérogé à la technique habituelle ou encore s’il est possible que dans son cas, un geste « élargi » (allant au-delà de ce qui était prévu) soit nécessaire… Le patient doit enfin être informé de l’existence d’alternatives thérapeutiques et de leurs bénéfices et risques associés, au vu de l’âge et de l’état de santé du patient.
Que conseilleriez-vous aux patients en matière d’information médicale ?
Informez-vous. Prenez le temps de la réflexion et, le cas échéant, sollicitez un deuxième avis. Pendant la consultation, n’hésitez pas à poser des questions et prenez le temps de lire la documentation qui vous est remise