Amyotrophie spinale : vers un dépistage néonatal généralisé
L’objectif du dépistage néonatal est de repérer, parmi des nouveau-nés a priori sains et sans symptômes, ceux qui sont porteurs d’une maladie, et ceci dans les 48 premières heures de vie de l’enfant.
Sous réserve de sa mise en place par le ministère de la Santé, le dépistage néonatal concernera l’amyotrophie spinale, qui touche environ 1 naissance sur 10 000. Elle se caractérise par une dégénérescence neuromusculaire (faiblesse musculaire) irréversible due à une anomalie génétique. Elle peut entraîner le décès de l’enfant avant l’âge de 2 ans. Pour le Pr Frédéric Huet, président de la Société française de dépistage néonatal, qui l’attendait impatiemment et qui s’exprimait au congrès de la Société française de pédiatrie en mai dernier, il était « difficile d’imaginer que les autorités de santé puissent être défavorables à un dépistage pour une maladie bénéficiant d’un traitement très efficace, surtout lorsque le retard dans la prise en charge peut avoir des conséquences graves. »
Le délai médian diagnostique se situe aujourd’hui entre 3 et 5 mois après la naissance. L’étude pilote Depisma a montré que le dépistage réduisait le délai à 7 jours. Celui-ci peut se faire simultanément avec les 13 autres maladies dépistées à la naissance, en utilisant quelques gouttes de sang séché sur buvard.
Le dépistage néonatal, le chiffres parlent d’eux-mêmes
Près de 38 millions d’enfants ont été dépistés depuis le début du dépistage néonatal, en 1972, pour les maladies progressivement intégrées dans le programme. « En 50 ans, 28 643 enfants présentant une pathologie sévère ont ainsi pu être pris en charge avant l’apparition de séquelles irréversibles ou inclus dans une filière de soins, c’est-à-dire un enfant sur 1320, une incidence significative, fait remarquer le Pr Frédéric Huet. Autre chiffre marquant, rien qu’en 2022, 1 230 enfants ont été dépistés soit 1 sur 592. Les Français commencent à se dire que ce n’est pas seulement pour les autres, mais potentiellement pour eux-mêmes. »
La France encore loin de combler son retard
Les perspectives à court terme pour le dépistage néonatal sont, dès le mois d’octobre 2024, la généralisation du dépistage de la drépanocytose (HAS du 10 novembre 2022). Actuellement, seule la France utilise un mode de dépistage ciblé chez enfants ayant des facteurs de risque (pays d’origine des parents…). De plus, le dépistage des Déficits Immunitaires Combinés Sévères (DICS) est prévu pour début 2025. Probablement aussi en 2025, une maladie métabolique devrait être ajoutée au programme de dépistage (le déficit en acyl-coenzyme A déshydrogénase des acides gras à chaîne très longue / VLAD). D’autres maladies métaboliques sont candidates à court terme (adrénoleucodystrophie, etc.) ainsi que des maladies lysosomales.
« Les progrès récents dans la compréhension des maladies, dans les technologies biochimiques et génétiques, ainsi que les thérapeutiques, comme les thérapies enzymatiques, protéiques ou moléculaires… offrent de nouvelles opportunités de traitement pour des maladies qui n’en bénéficiaient pas jusque-là », résume le Pr Huet. D’où l’urgence de pouvoir les dépister dès la naissance. Un enfant sur 150 est concerné aujourd’hui par une maladie potentiellement traitable ou « actionnable » (cause génétique qui peut être corrigée ou prévenue).
Avec l’amyotrophie spinale, 14e pathologie dépistée via le dépistage néonatal, la France comble en partie son retard, mais reste loin derrière d’autres pays européens. L’Autriche en dépiste 28, l’Espagne 27, l’Islande 26, le Portugal 25, et les Pays-Bas 20.