Hypercholestérolémie familiale : quand la pénurie de biothérapies met des vies en danger

Hypercholestérolémie familiale : quand la pénurie de biothérapies met des vies en danger

À la suite d’alertes répétées sur le risque de rupture d’accès aux médicaments anti-PCSK9, l’association de patients souffrant d’une hypercholestérolémie familiale (Anhet.f, l’Association Nationale des Hypercholestérolémies familiales et Lipoprotéines (a)) et les spécialistes investis dans cette maladie potentiellement grave ont été reçus par le ministre de la Santé le 16 juillet.

Qu’est-ce que l’hypercholestérolémie familiale ? 

L’hypercholestérolémie familiale, maladie d’origine génétique, est une forme héréditaire d’excès de cholestérol. Elle provoque, dès la naissance, une élévation parfois très importante du taux de cholestérol LDL (le « mauvais cholestérol »), avec un risque cardiovasculaire nettement accru.

L’hypercholestérolémie familiale hétérozygote, la plus fréquente, touche environ 1 personne sur 250, soit près de 300 000 personnes en France. Pour sa part, l’hypercholestérolémie familiale homozygote, beaucoup plus rare (1 personne sur 500 000), expose à des complications très sévères dès l’enfance : sans traitement, cette forme homozygote (taux de LDL cholestérol 6 à 8 fois supérieur à la normale) peut entraîner un angor (angine de poitrine : manque d’oxygène du muscle cardiaque), un infarctus du myocarde ou même une mort subite avant 30 ans, parfois dès l’enfance.

Mais la forme hétérozygote (taux de LDL cholestérol au moins 2 fois supérieur à la normale) est également grave : environ 50 % des hommes non traités feront un accident cardiovasculaire avant 50 ans, et 30 % des femmes avant 60 ans. Ces accidents peuvent survenir dès l’âge de 20 ans. En l’absence de traitement, l’état des artères à 40 ans chez ces patients est comparable à celui d’une personne de 80 ans.

L’hypercholestérolémie familiale reste largement méconnue : seules 20 % des personnes concernées seraient aujourd’hui diagnostiquées.

Que sont les anti-PCSK9 ?

Il y a une dizaine d’années, l’arrivée des médicaments anti-PCSK9 (alirocumab et evolocumab) était annoncée comme une révolution pour les personnes atteintes d’hypercholestérolémie familiale. Ce sont des biothérapies destinées aux personnes ayant un taux de cholestérol élevé qui ne baisse pas malgré un traitement hypolipémiant classique optimisé (statines et / ou ézétimibe), comme en cas d’hypercholestérolémie familiale, d’hypercholestérolémie résistante aux statines ou chez des personnes ayant des antécédent récents d’infarctus du myocarde, d’accident vasculaire cérébral (non hémorragique) et/ou d’artériopathie oblitérante des membres inférieurs (AOMI) symptomatique et qui conservent un taux de cholestérol très élevé en dépit, notamment de statines à doses maximales tolérées. Entre autres.

Leur mécanisme ? Ils ciblent une protéine, la PCSK9 qui a un rôle dans la capacité du foie à assimiler le LDL cholestérol. En inhibant la liaison de la PCSK9 avec le récepteur LDL cholestérol, ils augmentent la densité des récepteurs sur la surface des cellules du foie, et diminuent ainsi le LDL cholestérol circulant.

Ces traitements coûteux, réservés à des situations bien spécifiques, sont soumis à une demande d’accord préalable de l’Assurance-maladie. Leur remboursement en France a été progressif à partir de 2020-2021 et leur prescription a été élargie en 2022. Mais les difficultés d’accès à ces molécules restent considérables pour les médecins spécialistes qui ont l’autorisation de les prescrire.

Un (coûteux) retour en arrière ?

Lionel Ribes, président d’Anhet.f, a rappelé le 17 juillet lors d’une conférence de presse que « de nombreuses régions de France ne sont plus approvisionnées en anti-PCSK9*, avec à la clé une augmentation prévisible des hospitalisations de patients non traités (…) », en rappelant que « les maladies neuro-cardiovasculaires sont responsables de 140 000 décès par an ». L’Anhet.f reçoit quotidiennement des appels de détresse de patients confrontés à une double peine : celle de la maladie et celle de l’impossibilité d’accéder à un traitement pourtant disponible dans d’autres pays de l’Union européenne. D’où la mobilisation des sociétés savantes aux côtés des associations de patients et d’Alliance maladies rares.

Le Pr Vincent Durlach, membre du conseil scientifique d’Anhet.f, a expliqué que, faute d’anti-PCSK9 disponibles, les médecins pourraient être contraints de recourir davantage aux LDL-aphérèses pour traiter les patients les plus à risque sur le plan neuro-cardiovasculaire. La LDL-aphérèse est une technique déjà ancienne qui permet d’éliminer mécaniquement le LDL-cholestérol du sang. Comparable à une séance de dialyse, elle filtre spécifiquement les lipoprotéines athérogènes (c’est-à-dire celles qui favorisent la formation de dépôts dans les artères) et permet de réduire leur concentration dans le plasma d’environ 70 %. Il s’agit d’une méthode coûteuse, invasive et contraignante, généralement réservée aux cas les plus graves, lorsque les médicaments ne suffisent plus. Où lorsqu’ils ne sont pas ou plus accessibles…

En savoir plus : Association Nationale des Hypercholestérolémies familiales et Lipoprotéines (a)

* alerte de l’ANSM en septembre 2024 et le 28 avril 2025. Le Premier Ministre a lancé le 26 juin dernier une mission flash sur le prix des médicaments et un des laboratoires producteurs a annoncé le déremboursement de sa biothérapie anti-PCSK9.