Soumission chimique : des kits de dépistage remboursés à titre expérimental
« Nous allons expérimenter le remboursement par l’Assurance maladie dans plusieurs départements, de ce qu’on appelle des kits individuels permettant de détecter la soumission chimique », annoncé lundi 25 novembre le Premier ministre Michel Barnier, en déplacement à l’Hôtel-Dieu à Paris. Jusqu’à aujourd’hui, l’unique moyen de voir ces tests remboursés – 1 000 euros environ – est de porter plainte. « Or, les personnes victimes de soumission chimique le font peu, en partie en raison de l’amnésie qui peut survenir lors de l’administration. De nombreux facteurs compliquent considérablement la démarche de dépôt de plainte et rendent d’autant plus nécessaire une intervention de dépistage précoce et accessible à tous les patients, sans conditions de ressources », notait dans un communiqué du 24 octobre le Conseil national de l’Ordre des médecins qui demandait le remboursement des tests face à « un phénomène en recrudescence ».
Plus tôt ce lundi, à l’occasion de la Journée contre les violences faites aux femmes, Salima Saa secrétaire d’Etat chargée de l’Egalité entre les femmes et les hommes a annoncé le lancement d’une campagne de prévention contre la soumission chimique. Objectif : encourager le dépistage des victimes de soumission chimique en France, qualifiée de « nouveau fléau » par la secrétaire d’Etat.
« Les victimes vivent dans un doute constant »
La campagne fait écho aux procès des viols de Mazan, qui a braqué les projecteurs sur la soumission chimique. Elle a notamment été initiée par l’association #MendorsPas, cofondée par Caroline Darian Peyronnet, fille de Gisèle Pélicot, 71 ans, droguée par son mari durant une dizaine d’années pour la violer et la faire violer par des individus recrutés sur Internet.
Selon un communiqué de l’association, la soumission chimique se produit fréquemment dans la sphère privée. « Dans 81% des cas, l’agresseur est un membre de la famille. Dans près des ¾ des cas en 2022, les victimes d’inceste déclaraient avoir confiance en leur agresseur, et 59 % des victimes de violences sexuelles enregistrées en 2023 sont mineures. C’est la réalité tragique de ce fléau : les victimes vivent dans un doute constant, accablées par la honte et la peur de ne pas être crues, ou pire, d’avoir ‘imaginé’ l’impensable ».
La campagne est également portée, en partenariat avec l’Ordre des pharmaciens, par le Centre de référence sur les agressions facilitées par les substances (CRAFS). « Cette plateforme peut vous répondre et vous conseiller et vous indiquer dans quel laboratoire [aller], ce qu’il faut faire avec vos cheveux, les prises de sang, l’urine… », précise Salima Saa qui ajoute qu’un QR code sera disponible en pharmacie pour permettre aux victimes d’obtenir des informations et de s’orienter vers des professionnels compétents.
Les analyses capillaires quand l’analyse du sang et des urines n’est plus possible
L’enjeu autour de la soumission chimique est de réussir à prouver qu’on est une victime. « Je fais partie de ces 90 % de victimes qui demeurent invisibles : sans accès à des preuves toxicologiques et matérielles tangibles, sans dépistage démocratisé et systématisé sans une sensibilisation massive, les victimes, comme celle que je suis, continueront de pleurer dans l’indifférence générale », indique Caroline Darian Peyronnet dans un communiqué de l’association #MendorsPas.
Pour rappel, celle-ci a déclaré au début du procès « avoir l’intime conviction d’avoir été droguée ». Des photos d’elle, dénudée et inerte dans son lit, ont été retrouvées dans l’ordinateur de son père. Le remboursement était une demande formulée de longue date par l’association. « Notre objectif désormais est que toute victime présumée puisse, sans crainte ni obstacle, se rendre dans un laboratoire, une pharmacie, un hôpital ou chez son médecin pour obtenir un kit de dépistage remboursé », lit-on dans le communiqué.
Outre l’expérimentation des kits, le CRAFS souligne l’importance des analyses capillaires « seules capables de révéler une soumission chimique quand les délais ne permettent plus leur révélation dans le sang ou les urines ». Ces analyses permettent « de mettre en évidence une soumission chimique au long cours notamment dans le cadre des violences intrafamiliales ». Le Centre précise que le prélèvement, par un professionnel formé, est possible au moins 1 mois après la suspicion de soumission chimique « pour permettre la pousse du segment des faits ». Le CRAFS rappelle qu’il ne faut pas se couper les cheveux, ni les colorer ou les décolorer, ni appliquer un traitement agressif. Pour toute question, contactez les CRAFS >>> https://lecrafs.com/
Les symptômes de la soumission chimique : l’amnésie, la somnolence, les troubles du comportement, les troubles somatiques divers, les troubles du sommeil, les troubles de la mémoire, les troubles neurologiques divers, la perte de poids, un accident sur la voie publique, un syndrome de sevrage…