La goutte : une maladie chronique qui se traite au long cours
En France, la goutte affecte 0,9 % de la population, soit plus de 500 000 adultes, avec une prédominance chez les hommes. Toutefois, au cours des 20 dernières années, sa fréquence a doublé chez les femmes. En général, la maladie débute chez celles-ci environ 10 ans plus tard que chez les hommes, et se manifeste souvent après la ménopause.Il s’agit de l’arthrite la plus fréquente dans les pays occidentaux, c’est-à-dire une inflammation des articulations qui se manifeste par des douleurs, une raideur et un gonflement.
La goutte, un excès d’acide urique dans le sang
Le mécanisme de la goutte est le suivant : le surpoids, la consommation d’alcool, d’aliments riches en purines (abats, viande rouge, charcuteries, anchois, hareng, asperges, champignon, etc.) ainsi que la prédisposition génétique (favorisant un défaut d’élimination de l’acide urique par les reins) sont les principaux facteurs de l’hyperuricémie (élévation prolongée du taux sanguin d’acide urique). Au fil des années, les microcristaux d’urate de sodium se déposent dans les articulations.
La goutte se manifeste par des poussées inflammatoires articulaires, les fameuses « crises de goutte ». Bien qu’elles se résorbent spontanément en une à trois semaines, ou plus rapidement sous traitement, l’accumulation progressive de ces dépôts entraîne une infiltration et une destruction articulaire, aboutissant à une invalidité permanente.
Les risques d’une goutte mal traitée
Au cours ou à la suite des crises de goutte, un infarctus du myocarde ou un accident vasculaire cérébral (AVC) survient dans 3 à 4 % des cas, probablement en raison de l’inflammation aiguë. La goutte est favorisée par plusieurs maladies, dont l’insuffisance rénale, le syndrome métabolique, l’obésité, l’hypertension artérielle, le diabète et l’hyperlipidémie. Tous sont des facteurs qui amplifient le risque cardiovasculaire et augmentent le risque de décès précoce.
Or la goutte souffre d’une image banalisée, perçue comme peu grave, regrette l’Académie nationale de médecine dans un communiqué du 22 octobre. Cette perception doit être rectifiée, dit-elle, « car cette maladie à composante génétique peut devenir sévère, avec un risque de surmortalité précoce si elle n’est pas traitée sur le long terme, alors même qu’il existe des traitements très efficaces ».
Pour bien soigner la goutte, continuer le traitement après la crise !
L’excès d’acide urique dans le sang peut être corrigé grâce aux médicaments hypo-uricémiants prescrits dès le début et sur le long terme pour assurer un bon contrôle de l’uricémie. En complément, il est conseillé aux malades de limiter très fortement l’alcool, les bières avec ou sans alcool et les boissons sucrées riches en fructose, d’éviter les aliments les plus riches en purines, et de gérer le surpoids.
Malgré la disponibilité de traitements hypo-uricémiants efficaces, il est fréquent que les crises de goutte persistent. Les causes ? Une prescription insuffisante de la part des médecins, pointe l’Académie nationale de médecine, souvent influencée par la crainte d’effets secondaires cutanés graves liés à l’allopurinol, le traitement de fond de première intention contre la goutte. Ces derniers sont cependant rares et peuvent être largement évités par une augmentation progressive des doses. En troisième lieu, le traitement est souvent mal suivi, encore plus que dans les autres maladies chroniques. C’est pourquoi, l’Académie rappelle que « pour bien soigner la goutte, (il faut) continuer le traitement après la crise ! ».
Les règles pour un bon contrôle de la goutte
– Suivre un traitement hypo-uricémiant dès le diagnostic et pour toute la vie. L’objectif est de viser une uricémie inférieure à 50 mg/L (300 µmol/L). Pour y parvenir, le médecin utilise de faibles doses de colchicine pendant les six premiers mois. L’allopurinol réduit la production d’acide urique (ou un autre inhibiteur de la xanthine oxydase si le patient est intolérant) et doit être introduit progressivement et augmenté par paliers en fonction de la fonction rénale du patient. Quelques autres médicaments (probénécide…) existent, prescrits plus rarement ou réservés aux cas réfractaires.
– S’astreindre à une surveillance régulière de la valeur cible de l’uricémie afin d’adapter la posologie du traitement, même après la disparition des symptômes de goutte.
– Suivre scrupuleusement les conseils alimentaires, incluant une réduction drastique de la consommation d’alcool (les alcools forts, la bière qui est très riche en purines, même sans alcool) et en privilégiant les apports en laitages appauvris en graisses (lait écrémé). Un régime riche en purines animales multiplie par 5 le risque de crises de goutte chez un patient goutteux.
– Suivre autant que possible les programmes d’information et d’éducation thérapeutique proposés, afin de renforcer son observance du traitement.