Nutrition : le jeûne ? Pas d’indications !
Le jeûne correspond à une pratique très ancienne. Et pour cause, au cours de son évolution, l’espèce humaine a été soumise à de fréquentes fluctuations d’apport de nourriture, selon les saisons par exemple. L’organisme a ainsi « développé une réponse physiologique au manque de nourriture », soulignent les médecins suisses Christian Mottet et Sophie Sierro. Il s’est en quelque sorte adapté en modifiant son métabolisme « permettant ainsi de maintenir les fonctions vitales le plus longtemps possible à partir des réserves propres du corps ».
De nombreuses études
Continu, complet, partiel… La pratique du jeûne revient à se priver de nourriture durant un certain temps. Non sans risques, bénéficie-t-elle toutefois de certaines indications ? De nombreuses études ont été réalisées sur le sujet, aussi bien in vitro et chez l’animal que chez l’Homme. Dans le premier cas, les travaux font effectivement état de mécanismes moléculaires bénéfiques (résistance au stress oxydatif…) actionnés par le jeûne. Mais, fautes d’études consistantes, la littérature clinique ne confirme pas ces éléments.
En 2014, l’Inserm a conduit un travail sur le jeûne à visée préventive ou thérapeutique, réalisé dans un cadre médicalisé. Lequel, contrairement à d’autres pays comme l’Allemagne, n’est pas proposé en France. A l’époque, la conclusion était sans appel : « aucune donnée clinique reposant sur des essais méthodologiques rigoureux ne peut étayer aujourd’hui le bien-fondé de cette piste, qui reste donc pour l’instant essentiellement théorique ».
Preuves insuffisantes
Depuis, de nouvelles études ont été lancées, notamment dans le domaine de l’oncologie, en lien avec de nombreuses idées reçues qui circulent sur les réseaux sociaux. Selon lesquelles par exemple, il faudrait éviter de manger pour « affamer » les tumeurs… Début 2024, l’Inserm a dressé un nouvel état des lieux, avant de parvenir à une même conclusion : « les preuves accumulées sont clairement insuffisantes aujourd’hui pour affirmer que le jeûne ou même simplement la restriction en sucre sont bénéfiques pour lutter contre le cancer ou mieux supporter la chimiothérapie ».
Une ouverture scientifique ?
En mars 2024, une étape a sans doute été franchie dans la compréhension des effets du jeûne au sein de l’organisme. A partir de nouvelles techniques susceptibles de mesurer les taux de 3 000 protéines dans le sang, les auteurs ont d’abord confirmé que le corps changeait de source d’énergie – du glucose aux graisses stockées dans le corps – au cours des 2-3 premiers jours de jeûne. Avec une perte de masse – 5,7 kg en moyenne – à la clé, avant une stabilisation. Les scientifiques ont également pointé quelques protéines particulièrement impliquées dans la réponse de l’organisme au jeûne. Suffisant pour en tirer des indications thérapeutiques ? Pas à ce stade. L’étude en question n’a été réalisée qu’auprès de 12 personnes. Et sur une durée de 7 jours…