Pollution de l’air : l’ozone responsable de 115 000 décès en Europe entre 2015 et 2017
114 447 sur la période 2015-2017. C’est le nombre de décès dont l’ozone troposphérique (O3) serait responsable en Europe selon une étude menée par l’Inserm, le Barcelona Institute for Global Health (ISGlobal), et le Barcelona Supercomputing Center – Centro Nacional de Supercomputación (BSC-CNS), dont les résultats sont publiés ce lundi 3 juin dans Nature Medicine. Il s’agit de l’Europe au sens continental, qui englobe 35 pays, soit une population totale d’environ 530 millions de personnes.
Asthme, BPCO, altération de la fonction pulmonaire…
L’ozone troposphérique se forme dans la troposphère, la première et plus basse couche de l’atmosphère de la Terre. Il s’agit d’un polluant atmosphérique nocif formé par l’interaction de la lumière du soleil avec deux autres polluants, les composés organiques volatils (combustion de l’essence, évaporation de combustibles liquides, production de gaz et de pétrole…) et des oxydes d’azote (industries, combustion du charbon, essence…) émis en grande partie par les activités humaines.
Responsable de migraines, d’irritations des yeux et de la gorge, de toux, l’exposition à l’O3 est à l’origine de troubles respiratoires, parmi lesquels l’aggravation de l’asthme, la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO), la diminution de la fonction pulmonaire et les infections. Ces troubles peuvent engendrer, dans les cas les plus graves, des hospitalisations et des décès.
De l’ozone provenant de pays en dehors de l’Europe
L’équipe scientifique s’est appuyée sur le dispositif de mesure de la qualité de l’air Caliope, qui couvre l’Europe mais aussi sur une technique de modélisation qui leur a permis d’évaluer la dispersion et le transport des polluants atmosphériques, de la terre et de la mer, sur de longues distances. Les chercheurs ont ainsi pu évaluer le nombre de décès dus à l’O3 émis en Europe mais aussi importé.
Selon les résultats, parmi les 114 447 décès attribuables à l’O3 – en faisant l’une des principales causes de mortalité prématurée due à la pollution atmosphérique :
88,3 % des décès seraient liés à une exposition provenant d’autres pays ;
11,7 % à une exposition d’origine nationale.
Dans le détail, selon le communiqué de l’Inserm, « 20,9 % de tous les décès observés sont liés à de l’ozone ayant son origine dans les autres pays européens analysés, 60,2 % à de l’ozone provenant en dehors de l’Europe et les 7,2% restant à de l’ozone issu du transport maritime ».
En outre, l’O3 attribuable à la mortalité est en majorité émise par les pays les plus industrialisés, dont la France. « L’O3 en provenance de France a eu un impact significatif sur ses pays frontaliers tels que le Luxembourg (32,3 % des décès attribuables à l’O3), la Suisse (29,3 %), la Belgique (24,4 %) ou encore l’Espagne (16,8 %). »
Un phénomène accentué par le réchauffement climatique
« Notre étude souligne la nécessité d’une quantification systématique des contributions nationales, européennes et extracommunautaires des niveaux de pollution de l’air et de leurs effets sanitaires associés. L’objectif est de mettre en place des mesures de réglementation et d’atténuation pour lutter contre l’effet des polluants atmosphériques tels que l’O3 qui sont facilement transportés au-delà des frontières », explique Hicham Achebak, chercheur à l’Inserm (France) et à l’ISGlobal (Espagne). D’autant plus que « le réchauffement climatique renforcera les conditions de formation de l’O3 troposphérique à l’avenir, car les mécanismes photochimiques de formation de l’O3 sont favorisés pendant les vagues de chaleur et les périodes de fort rayonnement solaire. Lutter contre le réchauffement climatique est nécessaire pour améliorer durablement la qualité de l’air ».
A savoir : selon une étude publiée dans The Lancet planetary Health, les polluants de l’air, de l’eau et des sols sont responsables de 9 millions de morts chaque année dans le monde. Selon l’OMS en 2019, 4,2 millions de décès étaient attribuables à la pollution de l’air.