Maladie mentale : le vrai/faux de la schizophrénie
La schizophrénie est un trouble de la personnalité. FAUX.
Dr Sylvain Leignier : Ce stéréotype est véhiculé par les romans et le cinéma, comme le film « Psychose » d’Alfred Hitchcock. Non, la schizophrénie n’est pas un trouble de la personnalité. Ces derniers ont des caractéristiques qui se manifestent différemment, en perturbant les émotions, les pensées et le comportement, apparaissant dès l’adolescence ou au début de l’âge adulte. De plus, bien que les troubles de la personnalité puissent s’améliorer avec le temps, les symptômes les définissant restent généralement constants. En revanche, la schizophrénie n’est pas un trouble de la personnalité au sens de dédoublement de la personnalité. C’est une maladie distincte qui ne correspond pas à cette description, et qui a tendance à évoluer par phases.
La schizophrénie est une maladie rare. FAUX.
Environ 1 % de la population est touchée par cette maladie en France, soit environ 670 000 personnes. On pense que seuls les deux tiers des personnes concernées sont diagnostiquées. La schizophrénie est considérée comme relativement fréquente, car elle dépasse le seuil de prévalence définissant les maladies rares, qui est de 1 personne pour 2000.
La schizophrénie est une maladie héréditaire. VRAI et FAUX.
Les facteurs génétiques hérités font partie des facteurs de risque de la schizophrénie, mais ils ne sont pas les seuls. Ils doivent souvent s’accompagner d’autres facteurs pour contribuer au développement de la maladie.
La schizophrénie est une maladie incurable. VRAI et FAUX
Bien qu’une guérison ne soit pas possible, le « rétablissement » est une perspective réaliste, c’est-à-dire la possibilité de vivre avec des symptômes persistants ou une certaine vulnérabilité mais tout en ayant une très bonne qualité de vie. Nous visons une diminution du handicap, l’augmentation des compétences préservées et l’acquisition de nouvelles compétences. Il s’agit de surmonter les difficultés et de mener une vie personnelle et sociale intéressante, et ceci de manière digne.
Les personnes schizophrènes peuvent contrôler leurs symptômes sans médicament. VRAI et FAUX.
Les traitements antipsychotiques sont l’un des piliers de la prise en charge médicamenteuse. Mais les médicaments disponibles agissent principalement sur les symptômes positifs de la schizophrénie (délires et hallucinations), tandis qu’ils ont moins d’effet sur la désorganisation et les symptômes négatifs (manque d’expression émotionnelle, comportementale et de motivation). Ils ne traitent pas non plus les troubles cognitifs présents chez les deux tiers des personnes.
La schizophrénie s’accompagne souvent d’autres comorbidités, telles que des problèmes de sommeil, d’anxiété, d’addiction ou même des troubles obsessionnels-compulsifs (TOC). Dans ces cas, en plus des traitements antipsychotiques, on peut recourir à la mélatonine afin d’améliorer la qualité et la durée du sommeil et aux antidépresseurs en cas de troubles anxieux ou dépressifs.
Les approches non médicamenteuses peuvent être associées ; les thérapies comportementales et cognitives (TCC), par exemple. Elles visent notamment à modifier les pensées et les comportements dysfonctionnels associés à la maladie. Cela peut améliorer les symptômes négatifs et positifs, et contribuer à développer les compétences des personnes pour faire face au stress et vivre avec certains symptômes résistants. La stimulation magnétique transcrânienne répétitive (rTMS) peut agir sur les hallucinations. Les changements d’habitudes sont eux aussi bénéfiques (qualité du sommeil, réduction du stress et amélioration des compétences émotionnelles et de communication, activité physique, relations sociales, loisirs, alimentation peu transformée et limitant la consommation de sucre).
Les personnes atteintes de schizophrénie sont violentes et imprévisibles. FAUX.
Les études montrent qu’il n’y a pas plus d’actes de violence commis par les personnes atteintes de schizophrénie qu’en population générale. En revanche, et c’est peu connu, les personnes atteintes de schizophrénie sont bien plus souvent victimes d’actes de violence. La stigmatisation et l’auto-stigmatisation, la précarité financière et l’isolement social souvent associées aux troubles psychiques, ainsi que le manque de soutien et de réseaux pour ces personnes les rend encore plus vulnérables et moins en capacité à faire valoir leurs droits, solliciter et recevoir l’aide dont elles ont besoin.
Les personnes souffrant de schizophrénie ne peuvent pas mener une vie « normale », sociale et professionnelle. FAUX.
Les personnes souffrant de schizophrénie peuvent parfaitement s’intégrer dans la société. La schizophrénie n’est pas une condamnation à une vie déclinante. Il ne s’agit pas de nier les difficultés, mais de défendre la possibilité de cohabiter avec les symptômes, voire de les atténuer, et de construire une vie épanouie et satisfaisante. Bien que la stigmatisation persiste et que certaines barrières (accès aux loisirs, à l’emploi) demeurent, de nombreuses personnes atteintes de schizophrénie parviennent à mener une vie active au sein de la société. Faute de chiffres précis en France, les études menées dans d’autres pays estiment que seules 20 % d’entre elles travaillent.