Dengue : le virus responsable d’une érection de 18 heures chez un patient
Un cas « Hors du commun », selon les médecins du Centre hospitalier universitaire de Ouagadougou au Burkina Faso. Ces professionnels décrivent dans la revue Urology Case Reports de mars 2024, le cas d’un adolescent de 17 ans. Le jeune homme souffrait d’une dengue sévère, une maladie infectieuse causée par un arbovirus transmis par le moustique tigre. « Nous rapportons un cas exceptionnel de priapisme artériel survenu spontanément chez un adolescent de 17 ans, récemment admis au service de néphrologie pour nécrose tubulaire aiguë consécutive à une dengue sévère », explique les médecins du Centre hospitalier.
Priapisme artériel ? Cette dysfonction érectile se manifeste par une érection pénienne, involontaire, durant plus de quatre heures et en dehors de toute stimulation sexuelle. Elle est le plus souvent due à un traumatisme responsable d’une dérégulation du flux artériel des corps caverneux.
« Une érection incomplète, non douloureuse et persistante »
L’étudiant de 17 ans ne présentait pas d’antécédent médical. Il était hospitalisé depuis 5 jours en néphrologie. « Pendant environ 18 heures, il a présenté une érection incomplète, non douloureuse et persistante, survenue spontanément sans aucune stimulation sexuelle, sans aucune notion de traumatisme ni aucun facteur déclenchant, motivant l’équipe soignante à prendre un avis urologique », précisent les médecins.
Un sac de glace a été placé sur la verge du jeune homme. Au bout de 48 heures, une détumescence complète, sans séquelle, a été observée. Le patient a été reçu à 3 et 6 mois par un urologue pour une surveillance ; les corps caverneux étaient souples et les érections normales.
Les fuites vasculaires responsables du priapisme
Alors que le priapisme artériel est habituellement retrouvé après un traumatisme ou une chirurgie de la verge, comment l’expliquer chez cet adolescent ? La dengue est une fièvre hémorragique qui se caractérise par l’augmentation de la perméabilité vasculaire, qui entraîne une fuite vasculaire. « Ces fuites vasculaires et manifestations hémorragiques lorsqu’elles surviennent dans les artères caverneuses peuvent court-circuiter les artères hélicines (les artères qui permettent l’érection, ndlr) en passant directement d’une artère caverneuse au sang des corps caverneux. Cela entraînera un flux sanguin artériel non régulé dans les corps caverneux, provoquant un priapisme à haut débit », détailles les auteurs de l’article.
« Ce cas nous offre une opportunité unique d’approfondir notre compréhension des interactions complexes entre la dengue et le priapisme, repoussant ainsi les limites de notre expertise médicale. On note qu’une dengue sévère peut être à l’origine d’un priapisme aussi bien artériel que veineux », conclut les médecins.
A noter : de 2000 à 2019, selon l’OMS, le nombre de cas de dengue a été multipliés par 10, passant de 500 000 à 5,2 millions. L’année 2019 a connu un pic sans précédent, avec des cas signalés dans 129 pays. En 2022, en France, le nombre de cas de dengue autochtone avait connu une nette augmentation, 66 cas autochtones et 378 cas importés. La tendance à la hausse devrait se poursuivre en 2023 alors que le moustique tigre, responsable de la transmission du virus de la dengue, est implanté dans une large majorité des départements français.